LA REINE PIRATE: CHAPITRE 8

Jeudi 24 juillet 2025

8.

La nuit était tombée sur Rockfleet castle. Les torches dispersées projetaient contre les murs d’épais halos mouvants. Le vent fouettait les pierres comme une main impatiente, et bien que regarni sans cesse d’épaisses bûches de chêne, le feu, dans l’âtre de la salle haute, peinait à réchauffer Grace.

Elle avait cette fois débarqué dans une crique discrète et était arrivée par les prairies en fleurs. Elle n’était jamais plus entière que sur le Dark Queen, mais cette tower house de quatre étages, bravant les drumlins de Clew Bay de ses plus de dix-huit mètres de haut était importante pour elle. Elle n’avait épousé Iron Richard[1] en 1566 que pour s’en emparer. Elle avait divorcé de lui peu de temps après la naissance de Tibbot si bien qu’il ne lui restait de cet homme colérique et borné que ces deux trésors : cette place forte stratégique et son fils, le dernier de sa lignée. À chacun de ses séjours, rares depuis ces deux dernières années et la traque omniprésente de Bingham, elle y éprouvait le poids de sa solitude pour mieux s’en affranchir et en tirer la certitude qu’à l’exception peut-être de Liam O’Connor, aucun homme ne pourrait l’apprivoiser. Certes il y avait Fawkes, mais ils n’avaient jamais été amants. Probablement parce qu’en mer, elle était pirate avant d’être femme. Fawkes, de toute manière, la respectait trop pour y avoir seulement songé. 

Ce soir, pourtant, elle n’aurait voulu que lui à son côté. 

Assise à son bureau devant une bougie fatiguée, elle tenait entre ses doigts un billet froissé, déchiré au pli. Il lui avait été remis une heure plus tôt par un enfant du village, venu, tremblant, annoncer que « c’était pour elle ». De la part d’un soldat, posté à la lisière, qui n’avait rien dit d’autre. Et qui avait disparu.

Elle avait refermé la porte lentement, sans un mot. Depuis, elle n’avait pas bougé.

Il savait. Bingham savait qu’elle revenait parfois à Rockfleet castle. Mais elle avait pensé, ce soir, avoir déjoué l’attention de ses veilleurs. Cet homme la surprenait encore. Il eût pu envoyer une solide troupe pour encercler la tour, défoncer cette porte, la saisir. En terminer avec elle. Une fois pour toutes. Au lieu de cela, derrière ces quelques mots d’une écriture hautaine, maitrisée, il faisait montre d’une intention perverse. Pourquoi la capturer et la pendre comme il l’avait fait d’autres chefs de clans rebelles au risque de faire d’elle une martyre, une légende qui nourrirait la révolte au lieu de l’éteindre, quand il avait désormais les moyens de la briser de l’intérieur ? De la montrer affaiblie, impuissante à sauver ses fils, à protéger toujours le Connacht ? 

Un frisson la gagna. Elle le chassa en resserrant sur sa poitrine l’épais châle de laine dont elle s’était entouré les épaules. 

Elle baissa de nouveau les yeux sur le billet. 

« Ils parleront. Sous la torture tes fils parleront, l’un après l’autre. Ils me livreront tous tes secrets. Tu m’appartiens déjà Grace O’Malley. »

Ses fils. Elle revit leur visage. Leurs voix. Leurs promesses d’homme à moitié tenues. Cette famille qu’elle leur avait interdit, par son combat, de fonder. Leurs regards impétueux, juste avant que Bingham ne les lui vole. Combien de temps mettrait le bourreau pour les obliger à le baisser ? 

...

Les rendez-vous de Mireille Calmel

Par Mireille Calmel

Je suis née en décembre 1964, et depuis, je n’ai eu de cesse de me battre contre la maladie, la peur, l’adversité.

Condamnée trois fois par la médecine traditionnelle, j’ai eu la chance, immense, de m’en sortir grâce à ma mère, célèbre guérisseuse dans le midi de la France, mais aussi par l’usage des plantes médicinales, des huiles essentielles et une hygiène de vie rigoureuse.

Ma force, mon énergie, c’est dans l’écoute, le partage avec les autres et surtout, surtout dans l’écriture que je la puise.

Voici vingt cinq ans, j’ai signé mon premier contrat d’édition dans la prestigieuse maison XO pour un roman intitulé “Le lit d’Aliénor” qui allait séduire plus d’un million et demi de lecteurs.

Depuis, j’enchaîne les best-sellers. 32 à ce jour, toujours chez XO, car je suis d’un tempérament fidèle.

Mais cette réussite, c’est surtout à vous, mes millions de lecteurs que je la dois.

Ce sont vos regards qui pétillent, nos rires partagés, nos moments complices qui font mon bonheur. Qui font que la petite fille terrifiée d’hier est parvenue à s’aimer un peu. Juste assez pour rester humble face à tout cela et vouloir vous transmettre le meilleur de ce qu’elle aime, de ce qu’elle connaît.

Sans autre prétention que cela: vous remercier du fond du coeur de votre confiance sans cesse renouvelée.